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Ejicom

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Ecole supérieure de Journalisme, des Métiers de l'Internet et de la Communication.

mercredi 5 juin 2013

Commémoration "Mai 68" au Sénégal.

COMMÉMORATION DES 45 ANS DU MOUVEMENT ÉTUDIANT  DE « MAI 68 » AU SENEGAL. 

                               Le malentendu Senghor-étudiants

 

Le mouvement estudiantin de « mai 68 » à Dakar  a été une révolte universitaire et démocratique. A cette époque, il a causé une fracture entre l’ancien président sénégalais Léopold Sédar Senghor et les étudiants. Une rupture qu’il n’a pu ressouder jusqu’à son départ. A l’occasion des 45 ans du mouvement, le Centre de Recherche Ouest Africain (WARC) a abrité une table ronde. Des témoins ont relaté les faits marquants de ces événements.

Le mouvement  du 29 Mai 1968 a  été un tournant décisif au Sénégal. Il a participé  au processus de décolonisation et de démocratisation  du pays et aussi à l’éveil de conscience des citoyens. Ce furent  des heures chaudes, une fracture  entre  Senghor et les étudiants.

Le mouvement populaire des étudiants avait  comme slogan : «  nous voulons une université au service du peuple ». L’objectif  dudit mouvement  était d’africaniser  l’université, qui était le temple du savoir de toute l’Afrique. « Cette solidarité très forte entre les étudiants africains a poussé Senghor   à la négociation », a souligné Abdoulaye Bathily. Le  professeur Bathily a affirmé  qu’« il faut penser à nos autres camarades africains qui ont contribué au combat ».
« Pendant la période où les étudiants sénégalais se sont insurgés, organisant des marches et des débats, nous, jeunes Gambiens, restions solidaires avec le camp de Bathily.  En fait, les étudiants gambiens avaient bruyamment manifesté contre la visite de Senghor en Gambie qui a eu lieu à la même période », a témoigné par correspondance Mbye Cham, professeur à l’Université de Howard  à Washington DC.        
Le mouvement avait  mis le pouvoir «à genoux ». « Senghor était surpris de l’ampleur  de ce fameux événement. Car c’était  un mouvement qui était bien préparé. Le gouvernement avait tout calculé et programmé sauf les étudiants. C’est ce qui a causé le désamour, le désengagement des étudiants vis-à-vis de Senghor », s’est souvenu Ousmane Camara, ancien directeur de la Sûreté  nationale sous le régime de Senghor.
 Selon lui, ce mouvement a  créé  une révolte farouche et a semé un malaise entre Senghor et les étudiants. « Le mouvement populaire de mai 68  avait contraint le pouvoir, causant  un malentendu entre les étudiants et le président. A cette époque, la tension était vive, la situation chaotique, le pouvoir mis à genoux par  les étudiants. Ils  avaient même boycotté l’université pendant quatre mois »,  a renchéri l’ancien directeur de la Sûreté nationale, en marge  de  cette table ronde.
D’après Ousmane Camara, quarante neuf étudiants parmi lesquels le professeur Abdoulaye Bathily et Mamadou Diop Decroix, actuel secrétaire général du parti politique AJ/PADS, sont enrôlés de force dans l'armée et les étudiants étrangers sont rapatriés vers leur pays respectif.
« Nous avons passé deux jours au camp Archinard  à Ouakam. Par la suite, nous les Gambiens avions été chargés dans les camions pour être rapatriés en Gambie. Il en fut de même pour les autres étudiants ouest africains avec différents moyens de transport. Ils (les policiers) nous ont tout de même permis de récupérer nos bagages dans nos chambres avant de rejoindre la Gambie », a écrit également l’ancien étudiant gambien Mbye Cham dans sa correspondance.

 En effet, le mouvement du 29 mai est le prolongement de ce qui se passe aujourd’hui dans le système éducatif sénégalais. Il a eu un impact positif, puisqu’il a favorisé le maintien des bourses des étudiants, la diminution des salaires des ministres, des députés et des autres fonctionnaires de l’Etat. Il a participé à l’éveil de conscience politique et syndicale.
                                  
                      Ejicom. Infos.                            

mercredi 22 mai 2013

Panafricanisme


Gorgui Wade Ndoye, journaliste accrédité aux Nations-Unies, à Genève: «Rendre justice à l’Afrique c’est parler d’elle avec toutes ses complexités ».

Révolté à plusieurs reprises contre l’injustice, le racisme ambiant, le discours nihiliste sur l’Afrique, Gorgui Wade Ndoye est l’un des rares sénégalais qui s’est imposé sur la scène internationale mettant en valeur sa sénégalité et son africanité. Par ses paroles et ses actions il espère assumer sa mission qui est celle de rendre justice à l’Afrique.
Au cours d’une interview qu’il a accordée aux étudiants d’Ejicom (Ecole Supérieure de Journalisme des Métiers de l’Internet et de la Communication), le Directeur de ContinentPremier.Com et Observateur de l'utilisation de la langue française auprès de l'ONU et des organisations internationales basées à Genève, interpelle tous ses confrères sénégalais sur les sujets qui construisent le devenir de l’Afrique au lieu de parler des futilités.

Quel a été votre parcours en tant que correspondant à Genève au niveau des Nations Unies ?
Je suis arrivé à Genève, tout d’abord pour terminer mes études. Pour le passage du siècle en 2000, Genève avait invité un artiste planétaire, Youssou NDour, au sujet duquel j’ai fait un reportage. Les articles sont publiés par «Sud Quotidien », dont je suis devenu le correspondant permanent. J’ai rejoint le quotidien national, Le Soleil, l’Agence de Presse, Le Matin du Sénégal, et la radio anglaise, BBC-Afrique. Actuellement, je travaille pour Walfadjri. Je suis le premier journaliste sénégalais, correspondant de presse aux Nations Unies. J’anime enfin, depuis six ans un séminaire, « l’Image de l’Afrique dans la presse en Occident – le cas de la Suisse » au centre romand de formation des journalistes suisses (CRFJ), à Lausanne.

Pourquoi avez-vous choisi de parler de l’image de l’Afrique dans la presse en Occident, précisément en Suisse ?
Parce que les gens ont envie d’entendre un discours vrai sur l’Afrique, en tout cas ce que nous considérons comme juste. Rendre justice à l’Afrique c’est parler d’elle avec toutes ses complexités. Certes il y a eu des guerres en Afrique et encore des crises, mais, l’Afrique c’est aussi une jeunesse dynamique, le tiers des richesses mondiales, le berceau de l'Humanité etc. Si nous prenons l’exemple d’Ejicom, ce sont des jeunes qui sont entrain de poser la question sur l'âme africaine, sur l’intelligence et surtout sur les sujets liés à la construction de notre devenir. Je ne le dis pas pour vous jeter des fleurs.
 Est-ce que les Suisses sont au courant de votre engagement en faveur de la défense de l’image de l’Afrique ?
Bien sûr, il y a des personnes qui sont très bien au courant de ce je fais. Je n’avais pas voulu vous montrer l’article qui a été écrit à Genève par Pascal Décaillet un grand journaliste de la Suisse romande. J’étais surpris de lire cet article parce qu’il a fait « un coup de cœur » sur mon travail en tant que journaliste. Il m’a aussi donné en exemple, non pas uniquement pour l’Afrique, mais pour le journalisme de manière générale.
Les gens ignorent parfois la raison pour laquelle tu te bats. Si j’avais voulu être ministre dans ce pays je l’aurais été depuis très longtemps. Mais ce qui m’a toujours intéressé c’est le peu de travail que je fais. Je n’attends pas à ce que les journalistes sénégalais fassent des articles sur moi parce que malheureusement on manque parfois un peu de générosité entre nous (journalistes Ndlr). On préfère le passage d’un journaliste français, lui donner la parole. En général, ces journalistes insultent l'Afrique, et nous journalistes africains, sans aucun recul, nous sommes contents de mettre leurs dires à la Une de nos journaux. C'est peut être plus difficile de parler de quelqu’un qui s’est battu non seulement pour le Sénégal mais aussi pour l’Afrique !
Mais cela je ne le revendique pas car c’est notre devoir. Ce que je fais je dois le faire et les autres aussi doivent le faire. Je pense à une mission à accomplir et pour paraphraser Fanon « soit on assume soit on trahit sa mission ». J’espère assumer ma mission jusqu’à la fin de ma vie et c’est ce que j’ai dit devant la Salle de l’Assemblée des Nations Unies le 20 mars, Journée mondiale de la Francophonie en y invitant notre compatriote Ismaël Lô qui a donné un concert historique, car je crois profondément à l’humain.
Est-ce que parfois vous ne vous sentez pas seul dans votre combat ?
Parfois, pour être honnête, oui. Mais comme je vous ai dit tantôt on n’est jamais seul quand sa conscience est tranquille. La mienne est tranquille parce que l’Afrique a les atouts nécessaires pour aller de l’avant. Si aujourd’hui on donne à des jeunes sénégalais les moyens de travailler, ils vous feront un travail correct tout simplement. Il ne faut pas être complexé de rechercher le savoir, on a besoin toujours d’apprendre comme disait le philosophe Solon : « apprendre toujours apprendre, tels doivent être les propos d'un intellectuel qui se respecte.»
Comment est perçue l’image de l’Afrique aux Nations Unies de manière générale ?
Si l’on prend le Conseil de Sécurité, il y a les cinq permanents qui décident de tout. Malheureusement l’Afrique n’y a pas de siège permanent n'y est pas écoutée, cela est un défi à relever. Et un autre défi auquel, votre génération est confrontée est celui de l’unité africaine. Sur ce point, les intellectuels africains doivent se décomplexer par rapport à ce discours ambiant du nihilisme disant que l’Afrique est à la dérive. Je rappelle que, quand tous les continents avaient dérivé seule l’Afrique est restée intacte. Mais aussi il faut accepter que nous avons des problèmes par rapport à l’éducation de la jeunesse. Elle grandit très vite et elle a vite accès à certaines informations mais est-ce qu’elle arrive à les maitriser, à les analyser à les transformer et en faire un outil de souveraineté ? Si nous sommes informés par l’extérieur nous perdons aussi notre souveraineté. Et pour la gagner, pour gagner la bataille de l’économie, il nous faut aujourd’hui cette unité et je pense que les journalistes doivent être les portes paroles de nos populations. Donc, s’il vous plait, essayons de temps en temps de revenir sur des sujets qui construisent notre devenir au lieu de parler chaque jour de la lutte, de la danse, des faits divers. Il faut qu’on arrête de faire du snobisme.
Selon vous, quels sont les actes concrets que doivent poser les acteurs médiatiques pour mieux valoriser l’image de l’Afrique surtout en occident où le discours africain est falsifié ?
Un journaliste est d’abord un intellectuel qui doit être à l’écoute des populations et si l’on ne comprend pas réellement les enjeux d’une société et ses complexités, on ne peut pas parler au nom de cette même société. Mais malheureusement on est allé trop vite on a oublié que l’on doit recréer le journalisme.
Certes, le journalisme est universel, mais les faits sont différents d’un pays à un autre. Par exemple les réalités sociales sénégalaises sont différentes de celles de la France. La structure juridique, l'organisation économique, entre autres, ne sont pas les mêmes. Pourquoi voulons-nous donc copier sur les autres ? Je pense que les actes concrets c’est d’abord de rendre justice à l’Afrique et rendre justice à l’Afrique c’est dire l’Afrique de manière très claire.
Propos recueillis par les étudiants.